La grossesse dans un contexte de handicap physique/sensoriel
Nous vous proposons ici notre définition du handicap, qui nous paraît adéquate dans le cadre de la réflexion autour de la grossesse et de sa prise en charge :
Le handicap est la difficulté ou l’incapacité d’effectuer des gestes ou actions de la vie courante, en raison d’un dysfonctionnement physique, sensoriel, psychique ou intellectuel. Le handicap peut être modulé par l’accessibilité de l’environnement, tant matériel qu’humain, ainsi que par différents facteurs internes à la personne (fatigue, expériences de vie, etc)
Sur cette page, nous nous intéresserons essentiellement aux problématiques liant grossesse et handicap physique/sensoriel. Il existe des points communs avec la grossesse dans un contexte de handicap psychique/cognitif ou de neuroatypie, néanmoins chacune de ces circonstances particulières a ses nombreuses spécificités et nécessite sa page dédiée.
Vous trouverez donc la page dédiée à la grossesse dans un contexte de handicap psychique//cognitif ou de neuroatypie ICI.
Sommaire
Le handicap, un sujet sensible en gynécologie
Être hors des normes, une contrainte supplémentaire en cas de grossesse ?
Lors d'une grossesse souhaitée, la société questionnera souvent davantage le projet de parentalité d'une personne handicapée que d'iune personne valide. Cette attitude peut se retrouver tant au sein de l'entourage qu'avec des professionnels de santé.
Dans un contexte où la personne enceinte peut réfléchir en amont à ses souhaits pour la prise en charge de sa grossesse et à ses besoins, elle peut donc avoir du mal à obtenir un suivi et un accompagnement non jugeant. Et lors d'e la découverte d'une grossesse imprévue, la recherche est d'autant plus difficile en raison de l'accumulation des préjugés associés à une telle sitiuation.
Pourtant, quand on est handicapé, on est forcé de vivre au quotidien en jonglant avec des spécificités qui peuvent entraver chaque action courante. Comment imaginer qu'une personne concernée ne prenne pas en compte ce qu'elle doit assumer chaque jour pour une étape de vie aussi importante qu'une grossesse et/ou une parentalité ?
En France, la loi établit vos droits. personne n'a la légitimité de vous imposer une issue que vous ne souhaitez pas à votre grossesse.
Des questions spécifiques
Lorsqu'on se découvre enceinte sans l'avoir prévu dans un contexte de handicap, on se pose plusieurs questions supplémentaires par rapport à une personne valide :
Si vous désirez interrompre la grossesse, le parcours vers une IVG est-il complexifié par le handicap ? Une surveillance particulière est-elle nécessaire ? Comment rejoindre un lieu de soins rapidement en cas de complication après le geste ?
Si vous envisagez de poursuivre la grossesse, le handicap influera-t-il dessus et sur une éventuelle parentalité ? Quelle aide pourrez-vous réellement attendre des soignants pour adapter
- le suivi
- les examens
- l’accouchement
- les suites de couche ?
Comment, potentiellement, obtenir par la suite du matériel de puériculture adapté, travailler le portage et la sécurisation du logement ? Si vous avez besoin d'un accompagnement psychologique professionnel, celui-ci tiendra-t-il compte de la réalité quotidienne d'une personne handicapée ?
Dans tous les cas, la communication sera-t-elle simple avec les soignants ? Ce problème se pose bien entendu particulièrement en cas de difficulté/impossibilité physique de s’exprimer à l’oral, mais ce n’est pas le seul obstacle possible.
De manière générale, comment faire face aux préjugés liés au handicap, à la méconnaissance de certains praticiens sur les contraintes liées ? Il est toujours moins simple de communiquer efficacement quand on est dans une situation de stress. Là, il va falloir en plus faire coïncider vos contraintes et celles de professionnels ayant potentiellement un schéma de pensée différent du vôtre.
A toutes ces questions, il est difficile de répondre. Si la prise en charge médicale peut souffrir de nombreux problèmes systémiques, chaque histoire et chaque relation avec un soignant demeurent uniques. Et tout peut aussi très bien se dérouler ! Ici nous vous donnerons quelques pistes de réflexion pour mettre toutes les chances de votre côté, quel que soit votre choix concernant l'issue de votre grossesse.
Mettre en place une prise en charge correspondant à vos besoins
La sexualité active et la grossesse des personnes handicapées sont souvent des impensés dans la société. Pourtant, ces aspects de la vie courante existent bel et bien et dans la majorité des cas rien n'empêche une personne handicapée de tomber enceinte.
En cas de poursuite de la grossesse, cette dernière ne ne sera d'ailleurs pas forcément pathologique et ne nécessitera pas d'être suivie dans un service dédié aux grossesses à risques.
C’est bel et bien à vous d’estimer votre capacité à assumer la décision que vous prendrez à propos de votre grossesse. Nous ne pouvons que vous répéter une fois de plus que personne n’a à vous imposer une issue ou un accompagnement qui ne vous convienne pas.
Quelques conseils pour une prise en charge réussie
Vous pourrez souvent compter sur les compétences des professionnels de santé. Une consultation peut être l’occasion de dégrossir les obstacles purement pratiques à prévoir pour mettre en place votre parcours. Vous devez pouvoir poser toutes les questions qui vous tracassent.
La concertation et la confiance réciproque seront en effet très importantes entre vous et la sage-femme ou le médecin pour prendre et faire respecter votre décision de la manière la plus confortable pour vous tout en tenant compte des contraintes du professionnel.
N'hésitez pas si nécessaire à consulter tous les soignants et spécialistes de confiance qui vous suivent habituellement. Ils pourront vous fournir des conseils et informations précieux. Ils pourront également vous aider à mettre en relation tous les soignants autour de vous afin qu'ils puissent se concerter et vous proposer le parcours le plus adapté à vos besoins et souhaits.
Cela peut être utile notamment pour optimiser les traitements en cours, la douleur éventuelle ou un épuisement lié à la grossesse. Cette mise en commun des compétences et connaissances peut rassurer chacun, vous comme les soignants peu à l'aise avec le handicap.
Si vous avez des difficultés ou des caractéristiques compliquant la communication avec des personnes valides, vous pouvez de votre côté proposer aux soignants des outils pour simplifier les échanges.
Par exemple vous pouvez demander aux soignants
- de passer par l'écrit pour discuter
- D'attendre que vous ayez fini de parler même si vous avez des troubles de l'élocution
- d'éviter certains gestes ou attitudes
- de faire des efforts particuliers d'articulation
- d'éviter de faire des entretiens dans des environnements trop bruyants/colorés
- de prévoir les entretiens à distance des prises de médicaments
- etc...
Il est indispensable que les soignants acceptent les outils proposés pour faciliter le dialogue. Le suivi de votre grossesse ou la préparation de votre IVG ne doit pas se faire sans concertation constante avec vous.
Vous pouvez aussi réfléchir, seule ou non, à rédiger un document sur ce que vous voulez que les soignants fassent si vous n'êtes temporairement pas en état d'exprimer vos besoins ou votre volonté. Cela permettra aux gens de réagir de la manière la plus adéquate possible.
Bien entendu, ce sera forcément dépendant de la possibilité de mettre en oeuvre vos directives, mais il y a plus de chances d'avoir un comportement adapté à votre situation s'il existe une base pour le définir !
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Vous souhaitez poursuivre votre grossesse
Vous désirez poursuivre votre grossesse ? Nous vous proposons quelques conseils dédiés :
Plus tôt vous pourrez baliser vos contraintes et besoins concernant le suivi de grossesse et une éventuelle parentalité, mieux vous pourrez communiquer à propos de ces impératifs avec les soignants, qui pourraient parfois avoir une idée faussée de votre situation. Si vous en avez la possibilité, rédigez (ou faites rédiger) un document qui servira de "mode d'emploi" sur différents sujets : matériel médical adapté pour les examens, gestion de la douleur, documents d'information accessibles, etc.
Comme expliqué plus haut, être enceinte et handicapée ne signifie pas forcément que votre grossesse est à risques. Vous renseigner à ce sujet vous permettra de réfléchir au suivi à mettre en place et les éventuels professionnels spécialistes à solliciter, mais également sur le type de maternité dans lequel vous souhaitez accoucher.
Pour rappel, il existe trois niveaux de sécurité en maternité :
- Les maternités de niveau 1 accueillent les personnes enceintes dont la grossesse et l'accouchement ne présentent a priori pas de risque particuliers. Ces établissements ne disposent pas d'unité de néonatalogie. Il est possible d'organiser un suivi adapté à vos besoins là-bas dans ce cadre si votre grossesse n'est pas pathologique.
- Les maternités de niveau 2 possèdent une unité de néonatologie et de soins intensifs. Elles peuvent accueillir des prématurés nés après 33 semaines de grossesse tant qu'ils ne nécessitent pas de soins trop lourds, notamment sur le plan respiratoire.
- Les maternités de niveau 3 possèdent tous les services nécessaires à une prise en charge néonatale lourde, y compris dans le cadre d'une grande prématurité. Par ailleurs, ces maternités sont spécialisées dans le suivi de grossesses pathologiques et/ou multiples (qavec plusieurs embryons/foetus)
Sachez enfin qu'en cas de problème non prévu lors de la grossesse ou de l'accouchement et si la maternité qui vous suit ne peut assurer les soins dont vous ou le bébé avez besoin, un transfert sera organisé vers un service apte à vous recevoir.
Aborder avec les professionnels de santé la question du choix du niveau de sécurité nécessaire pour vous suivre permettra de préparer ensemble au mieux votre accouchement et ses suites.
Vous pouvez également visiter les maternités qui vous intéressent avant de vous y inscrire, afin notamment de vérifier que le matériel, les chambres, etc. correspondent à vos besoins.
Cette visite permettra aussi d'échanger avec l'équipe médicale qui vous prendra en charge, y compris après votre accouchement. C'est le moment d'aborder tout sujet qui vous préoccupe ! Par exemple, si vous entamez une parentalité ou si vous désirez assurer les soins au bébé dans le contexte d'une procédure de remise de l'enfant à l'adoption, saisissez-vous de cette occasion pour voir comment les soignants peuvent vous accompagner et vous soutenir, au niveau matériel comme humain.
Vous trouverez sur Handirect quelques conseils supplémentaires pour les personnes enceintes qui ont un handicap moteur
Vous souhaitez interrompre votre grossesse
Vous souhaitez interrompre votre grossesse ? Voici quelques informations et conseils plus spécifiques :
Si vous en avez la possibilité, une fois votre décision prise et le plus tôt possible dans votre parcours, faites le point pour prioriser vos besoins. En effet, selon la méthode d'intervention qui sera convenue avec le médecin ou la sage-femme, certains choix et questionnements peuvent se présenter ;
En cas d'IVG médicamenteuse, un professionnel de santé peut être plus réticent à vous proposer de la mener à domicile, notamment si vous avez une mobilité réduite. En effet, si des complications surviennent suite au geste, il faut pouvoir vous rendre rapidement dans un service d'urgences.
Si vous êtes concernée par cette problématique et que vous souhaitez néanmoins organiser une IVG chez vous, il est donc nécessaire de prévoir une organisation viable et fiable pour vous transporter au cas où et de communiquer dessus auprès des soignants pour les rassurer.
Toujours concernant les éventuelles complications, si vous avez des déficiences sensorielless ou que d'autres circonstances rendent plus difficile l'identification de signes préoccupants, il peut être utile de trouver une stratégie pour pallier à ce problème. Cela peut être la présence d'un tiers de confiance, un passage infirmier programmé...
Si vous acceptez ou préférez que l'IVG se déroule en service hospitalier, n'hésitez pas à prévoir de quoi assurer votre confort et/ou réconfort jusqu'à son aboutissement : livres, musique, console... tout ce qui pourra vous distraire des sensations ou ressentis dépl sera bienvenu. Si vous désirez ou avez besoin que quelqu'un vous accompagne, parlez-en à l'avance pour valiser sa présence à vos côtés.
Concernant l'IVG instrumentale, certains soignants vous inciteront à privilégier une anesthésie générale. Pour votre confort, mais également pour faciliter l'intervention pour l'équipe médicale. Là encore c'est à vous de décider.
Petit rappel important : si vous ne trouvez pas d'accord sur le protocole d'IVG , gardez en tête le facteur temps qui risque de réduire vos possibilités pour chercher un autre profesionnel pour faire cette intervention.
Trouver des informations et du soutien
Notre société, tout comme ses structures et institutions, présente en majorité une accessibilité limitée, voire inexistante en fonction des handicaps. Cet état de fait générera divers obstacles supplémentaires lors de vos démarches, Vous entourer de soutiens de confiance vous aidera à les traverser ou à les contourner plus facilement.
Des structures et services adaptés
Il existe des services et des structures dédiées à la prise en charge gynécologique et/ou obstétrique des personnes handicapées enceintes. Ces endroits sont certes peu nombreux et mal répartis sur le territoire, mais les connaître peut vous être utile. Nous vous en présentons certaines ici, mais n'hésitez pas à consulter nos pages de ressources extérieures pour trouver d'autres structures correspondant à vos besoins.
- A l'institut Monsouris, dans le 14ème arrondissement de Paris, il existe un service de suivi gynéco et obstétrique dédié aux personnes handicapées.
- A Lyon, depuis 2017, l'hôpital de la Croix-Rousse a créé le parcours Handimam, lui aussi prévu pour les personnes handicapées enceinte ou ayant un projet de parentalité.
- Depuis 2023, ont émergé dans de nombreuses régions de France des centres ressources IntimAgir. Ces centres, soutenus par les Agences régionales de Santé (ARS) sont dédiés à l'information et à la protection de la santé sexuelle, de la vie affective et sexuelle et des droits reproductifs des personnes handicapées.
Le soutien associatif
Certaines associations peuvent vous offrir un appui matériel, moral et légal lors de votre grossesse, mais aussi vous assister dans la mise en place de votre choix concernant son issue.
Il est par exemple trop peu connu que le Planning Familial développe une expertise dans l'accompagnement à la santé sexuelle et le soutien des droits reproductifs des personnes handicapées (source ICI) Cette association d'éducation populaire a également participé à l'émergence des centres IntimAgir, que nous évoquions plus haut.
Si vous désirez devenir parent à la suite de votre grossesse, plusieurs associations peuvent vous prêter du matériel de puériculture, faire de la pair-aidance (soutien entre personnes concernées par une même problématique) proposer des ateliers de portage, etc. Handi-parentalité, notamment, est une association dont les parents-relais sont présents dans différentes régions.
Le soutien de l'entourage
Vous avez des proches soutenants dans votre entourage ? Qu'il s'agisse de votre partenaire de vie, de votre famille, d'amis, ou de n'importe qui de présent et de fiable à vos côtés, ces personnes seront souvent de bons alliés en cas de difficultés.
En premier lieu, cet aidant pourra vous fournir une aide technique et logistique : déplacements, orientation, lecture de documents non adaptés, etc. Cela vous évitera d'accroître votre fatigue et votre stress dans une situation déjà anxiogène.
Mais un proche peut également, si vous le désirez, faciliter vos interactions avec certains soignants. Ce soutien peut être sur la forme, par exemple en facilitant les échanges si vous avez du mal à oraliser, ou sur le fond, en rappelant à certains professionnels de santé indélicats qu'en tant que première concernée par votre grossesse, vous êtes, et devez rester, la principale interlocutrice concernant votre suivi et/ou les actes médicaux à envisager.
Enfin, un soutien émotionnel n'est jamais à négliger. Une grossesse, qu'on l'interrompe ou qu'on la poursuive, est un événement qui puise dans les ressources psychiques et physiques.
D'autres informations et ressources
Sur cette page, nous avons mentionné quelques ressources disponibles sur la grossesse dans un contexte de handicap moteur et sensoriel. Mais n'hésitez pas à consulter nos pages de ressources externes, vous en trouverez bien d'autres !
Les ressources institutionnelles
Les essources associatives/individuelles