J'envisage de confier le bébé issu de la grossesse à l'adoption

Quelles que soient les circonstances de votre grossesse, vous avez la possibilité de la mener à terme et de confier le bébé qui en sera né à l’adoption. Vous seule pouvez décider si c'est la meilleure solution dans votre situation personnelle. A l'inverse, personne n'a le droit de vous imposer ce choix contre votre volonté.

Sachez également que cette décision est réversible : Après l'accouchement, vous avez un délai de deux mois pour renoncer à confier l'enfant et choisir d'élever l'enfant né. (source ICI). Là encore, personne n’est légitime à vous contester ce choix.

Un questionnement à plusieurs facettes

Plein de panneaux routietrs aves des points d'interrogation

Confier un bébé à l'adoption et accoucher sous x sont deux solutions peu proposées en France. On parle trop souvent d'abandon. Ce terme très négatif ne représente pas la réalité de ce choix, souvent multifactoriel. La remise à l'adoption permet objectivement un compromis entre vos intérêts et ceux du bébé dans le cas où vous ne pouvez ou voulez pas l'élever.

Il sera pris en charge par les professionnels de santé puis par l'ASE, ce qui lui assurera un minimum de sécurité et de protection.  Quant à vous, vous pourrez être suivie médicalement pendant la grossesse.  

La réflexion concernant la mise à l'adoption d'un enfant va vous faire vous poser plusieurs questions : à qui parler de la grossesse ? A qui la cacher ? Voulez-vous accoucher sous x ou sous votre identité ? Qu'arrivera-t-il à l'enfant ? comment vont se passer la grossesse, l'accouchement, l'après ?

Faisons le point sur tout cela.

Mener la grossesse à terme

Vous devrez vous préparer à ressentir les effets physiques, psychiques et hormonaux de la grossesse durant plusieurs mois. Ces effets sont extrêmement variables d'une personne à l'autre.
Vous pourrez tout aussi bien n’avoir aucun symptôme gênant qu’être très incommodée du début à la fin. Mieux vous saurez vous écouter et vous soigner, Meilleures seront vos chances de bien vivre la grossesse.

Vous devrez également envisager des examens potentiellement anxiogènes et inconfortables, tels que des échographies, des touchers vaginaux ou des monitorings.
En général, ces gestes pour vous assurer le meilleur suivi. Vous avez néanmoins le droit de les refuser ou de demander une information loyale sur leur nécessité et leur déroulement. Rien ne peut légalement être pratiqué sans votre consentement éclairé.

Attention ! Il est dangereux de mener votre grossesse sans suivi ni aucune assistance médicale !
Être enceinte n’est pas une maladie, mais nécessite un minimum de surveillance et de précautions, tant pour vous que pour l’embryon/fœtus. Plus d'informations à ce sujet ICI

Si vous craignez d'approcher le milieu médical, n'hésitez pas à solliciter des centres de santé communautaire ou d'autres structures qui ont une approche du soin parfois différente des hôpitaux et cabinets libéraux.
N'oubliez pas également qu'hors grossesse pathologique, une sage-femme peut tout autant vous suivre qu'un médecin.

Un nouveau terme dans l’équation

Si vous poursuivez votre grossesse jusqu'à l'accouchement, vous ne serez plus la seule personne à prendre en compte : vous aurez créé un nouveau terme à l'équation : le bébé.
Ce dernier sera entièrement dépendant des adultes pour chacun de ses besoins. Les soignants seront attentifs à lui donner les meilleures chances de naître en bonne santé. Ils souhaiteront donc que vous participiez à atteindre ce but.

Vous n’avez aucune obligation d’éprouver des sentiments positifs à l'égard du fœtus, ni du bébé né. De même, aucune disposition légale ne vous oblige à prendre soin de votre grossesse. Vous y serez néanmoins incitée par les dispositifs de sécurité sociale et CAF en vigueur. Sachez notamment que les soins liés à votre grossesse sont pris en charge à 100%  (source ICI)

Néanmoins, votre santé peut éventuellement se retrouver fragilisée si vous négligez tout suivi de grossesse. Par ailleurs, au-delà de votre ressenti qui vous appartient pleinement, le bébé ne cherche pas à vous nuire. Il est comme vous propulsé malgré lui dans une situation difficile. L’idéal serait donc que vous vous en sortiez tous les deux au mieux.

Pour prendre la décision de poursuivre votre grossesse et de confier le bébé à l'adoption, vous devez être certaine de pouvoir assumer le deuil de votre maternité possible. Ne pas pouvoir ou vouloir être parent ne signifie pas ne pas se poser de questions à ce sujet. Et cela n'évite pas forcément de souffrir de renoncer à cette parentalité, même lorsque votre choix est bien éclairé. C'est par exemple pour répondre à ces problématiques qu'un soutien psychologique peut être utile et bénéfique. Si vous souhaitez être épaulée à ce niveau, n'hésitez pas à demander à rencontrer un professionnel. Vous avez le droit d'être accompagnée.

Si vous avez accouché sous votre votre identité ou si vous avez levé le secret de votre identité à n'importe quel moment après votre accouchement, vous devez aussi vous préparer à l'éventualité de recevoir des années plus tard une demande de contact d’un individu en pleine recherche de ses origines. Vous ne saurez rien de lui, sauf que vous lui avez donné naissance.

Dans un tel cas, vous ne serez absolument pas obligée d'accepter de répondre. C'est votre décision, vos raisons. Néanmoins si vous en avez la capacité, il est reconnu que l'accès d'un enfant à son histoire personnelle peut l'aider à mieux se construire. Il existe un organisme dédié au recueil des éléments laissés par les personnes ayant confié leur enfant, mais également à l'accompagnement des enfants confiés souhaitant rechercher leurs origines : le CNAOP (conseil national d'accès aux origines personnelles)

Sachez aussi que si vous le faites, ça n'aura aucune conséquence légale ou de filiation. Autrement dit, cette personne ne "redeviendra" pas votre enfant légalement (source ICI). Vous ne lui devrez rien, elle ne vous devra rien au niveau légal. Mais ça peut être un événement intense, auquel il faut être prête. Là encore, un soutien psychologique peut être utile !

Vous pouvez parfaitement passer au travers de ces deux problématiques mais il est assez probable que vous y soyez confrontée à un moment ou à un autre. 

Cacher la grossesse à des proches ?

Envisagez-vous de cacher votre état à des proches, voire au géniteur du bébé ? Si oui, n’oubliez pas que cette dissimulation sera de moins en moins évidente au fur et à mesure de l’avancée de la grossesse : les modifications de votre corps, les contraintes alimentaires et physiques associées à votre état, les rendez-vous de suivi médical... peuvent dévoiler votre situation à tout moment. 

Une solution possible serait de vous éloigner des personnes à qui vous souhaitez dissimuler votre grossesse. Ca peut avoir l'avantage de vous protéger si besoin. Mais partir plusieurs mois (voire plus) nécessite d'organiser cette étape au maximum. Vous devrez trouver du soutien pour ce faire. 

Vous devrez aussi penser à des éléments tels que
- le logement
- un revenu minimal pour vous nourrir et subvenir à vos besoins
- le transport pour votre suivi
Etc.

Les étapes avant de confier son enfant à l’adoption

Chemin

Une fois votre décision prise de confier le bébé à naître à l’adoption, vous devrez déterminer plusieurs choses à plus ou moins long terme :

Quels interlocuteurs ?

A qui souhaitez-vous ou pouvez-vous parler de votre grossesse et de votre projet de vous séparer du bébé ? Quelles personnes fiables et soutenantes peuvent vous accompagner dans ce parcours ?

Votre médecin traitant, votre gynécologue ou votre sage-femme si vous avez déjà un suivi, sont normalement les personnes les plus au courant de votre parcours médical. Ils peuvent donc faire lien avec la maternité pour que vous ayez une prise en charge adaptée au mieux à votre situation personnelle. Les professionnels de santé étant soumis au secret médical, vous pouvez normalement évoquer librement vos attentes et besoins.

Les travailleurs sociaux sont ceux qui pourront le mieux vous aiguiller au niveau administratif afin de voir les aides et soutiens dont vous pourriez bénéficier. Ils pourront aussi vous soutenir dans des démarches pour un logement d'urgence ou votre protection si besoin.

Le tissu associatif peut lui aussi être un soutien non négligeable : les militants sont parfois plus au fait des réalités de terrain que d'autres interlocuteurs plus intégrés dans le système institutionnel et ont appris à se battre pour les causes qu'ils défendent. Souvent, les personnes engagées dans des associations ont elles-mêmes eu un vécu qui leur permet d'offrir une empathie particulière. Dans le domaine de la mise à l'adoption d'un bébé et de l'accouchement sous x, vous pouvez notamment contacter le service M.O.I.S.E
(Maison de l'Orientation, de l'Information, du Soutien et de l'écoute aux femmes enceintes en difficulté) ou le Planning Familial.

Vous êtes la personne la plus à même d'estimer la confiance que vous pouvez placer dans votre entourage amical ou familial et l'aide que vous pouvez en attendre. N'oubliez pas dans tous les cas que vous n'avez pas de honte à avoir à évoquer votre proje

Accouchement sous x ou identité dévoilée ?

Souhaitez-vous accoucher sous X ou sous votre identité réelle ? Dans le cas où vous ne souhaitez pas l'anonymat, l'état civil de votre enfant gardera mention de votre nom. Cela n'entraînera néanmoins pas une filiation juridique sans votre consentement.

Si vous préférez rester anonyme, vous devrez penser à ce que vous désirez laisser ou non comme éléments d’identification à l’équipe qui vous suit et à l’enfant plus tard. Si le bébé devenu grand cherche à comprendre ses origines biologiques, ce que vous transmettez lui permettra d'avoir des traces de son passé. Vous pouvez également remettre des éléments affectifs, comme une lettre, un souvenir...

Enfin, tout élément de santé (antécédents médicaux personnels et familiaux notamment) pourra être utile aux professionnels qui prendront en charge l'enfant, mais également à ce dernier plus tard.

Soutien psychologique

On en remet une couche : un soutien psychologique est souvent un atout précieux dans un projet de mise à l'adoption d'un bébé. Vous pouvez vous retourner vers des psychologues en libéral ou vers le CMP (centre médico-psychologique) de votre secteur.

Vous pouvez également solliciter la PMI (protection maternelle et infantile) ou l'ASE (Aide Sociale à l'Enfance) de votre département. Dans ces deux branches des services départementaux, un suivi psycho-social peut vous être proposé dès qu'enceinte, vous manifestez votre questionnement sur la mise à l'adoption. Enfin, certaines associations comme M.O.I.S.E (constituée de professionnels de la santé et du social indépendants de toute institution ou structure hospitalière, et non confessionnelle malgré son nom ) ou le Planning Familial proposent aussi un soutien psychologique aux personnes désirant confier un bébé à l'adoption.

Les formalités légales

Vous devrez ensuite alerter l’établissement de santé qui suivra votre grossesse de votre choix d'accoucher sous x ou de confier l'enfant à l'adoption tout en préservant votre identité. Si vous demandez l'anonymat, un dossier avec une identité fictive sera créé à la maternité. Personne n'a le droit d'outrepasser votre demande ou de faire enquête sur votre identité (source ICI)

L’équipe qui assurera votre suivi sera tenue de vous informer des formalités et conséquences de l’accouchement sous x si telle est votre décision, c'est à dire :
- De votre possibilité à tout moment de la grossesse de renoncer à votre demande. Dans ce cas le dossier sera remis sous votre identité et si vous ne voulez plus confier le bébé, vous repartirez sur un suivi classique.
- Ce qu’il adviendra de l’enfant après que vous aurez accouché.
- De la possibilité que vous avez de lui laisser sous pli fermé votre identité complète ou partielle, ou tout élément vous concernant ou que vous tenez à lui adresser (lettre, souvenir…)
- Des aides légales possibles auxquelles vous avez droit pour élever un enfant
- Des délais et conditions pour récupérer votre enfant si telle était votre demande après accouchement.

Adoption simple ou plénière

En France, il existe deux modalités d'adoption : l'adoption simple, où le parent biologique de l'enfant peut conserver des liens avec lui, plus ou moins forts selon ses souhaits, et l'adoption plénière, qui rompt toutes les attaches (source ICI).

C'est à vous de décider si vous voulez garder une implication dans la vie du bébé, que ce soit juste en prenant de ses nouvelles ou en ayant une place auprès de lui, même si ce n'est pas dans le rôle de parent. Une adoption plénière ne sera possible qu'avec votre accord, sauf en cas de circonstances pénales particulièrement graves. Et même dans ce cas, un juge doit trancher.

Enfin, sachez que si vous vous manifestez auprès de l'enfant dans les deux ans qui suivent sa naissance, même en prenant simplement de ses nouvelles par courrier, ça sera compris comme un désaccord avec une adoption plénière.

Le moment venu

Un nid avec une cigogne qui semble veiller sur un oeuf

Si vous décidez d’accoucher sous X, tous vos soins, y compris l’accouchement proprement dit, seront anonymisés et un numéro de sécurité social temporaire vous sera affecté le temps de votre suivi. La prise en charge financière est assurée par l'ASE de votre secteur (Source ICI)

Une fois le bébé né, il pourra être un temps hospitalisé dans un service de la maternité. Puis il sera pris en charge par des professionnels de l’ASE en pouponnière durant votre délai de rétractation possible, soit deux mois.

Ensuite, si vous maintenez votre décision de le confier, ils continueront à en prendre soin jusqu’à son adoption ou sa majorité, en pouponnière/foyer ou en famille d'accueil.

 

Pendant deux mois donc, vous aurez le droit de voir le bébé comme vous le souhaitez et de lui prodiguer des soins avec l’appui si nécessaire des soignants, puis des éducateurs et travailleurs de l’ASE.

Vous n’avez pas à justifier votre démarche en ce sens auprès de qui que ce soit et les professionnels sont tenus de vous faciliter l’accès à l’enfant et de vous permettre de lui prodiguer correctement les soins adéquats.

A l'inverse, si vous préférez n'avoir aucun contact avec le bébé une fois celui-ci né, votre désir doit être absolument respecté.

 

Vous avez également le droit de choisir le prénom de l’enfant né de votre grossesse. Celui-ci sera inscrit sur son état-civil et si vous en donnez plusieurs, l’un d’eux sera son nom de famille. Ce n'est pas une obligation et vous avez tout à fait le droit de refuser cette démarche.

 

De même, pour les éléments que vous pouvez laisser tant à l'équipe médicale qu'au bébé : ce n'est en rien une obligation. Néanmoins sachez que toute information que vous pourrez transmettre peut être précieuse au niveau pratique ou affectif pour l'enfant devenu plus grand.

 Vous pouvez donner 

- des précisions sur votre santé ou celle du géniteur du bébé

- des éléments sur votre histoire et les circonstances de la grossesse et de la naissance du bébé

 Vous pouvez aussi laisser sous pli fermé votre identité réelle, qui ne sera dévoilée à l'enfant en quête de ses origines qu'avec votre accord et sous certaines conditions (source ICI

Vous restez maîtresse de toutes les traces que vous laisserez de vous. La balance est évidemment difficile entre votre besoin d'anonymat et le besoin de l'enfant devenu grand de comprendre d'où il vient pour mieux se construire.

Des complications possibles lors de vos démarches

Parfois rien n'est simple...

Dans votre parcours, vous pourrez vous heurter à l'hostilité ou à l'incompréhension des gens autour de vous. Les avis et conseils sur ce que vous devriez faire ou ne pas faire pleuvront.

Sachez que vous n’avez pas à vous justifier auprès de chaque personne qui vous interpellera. Si vous êtes sûre de votre choix, foncez ! Si vous êtes hésitante, cumulez les informations, posez des questions. Mais ne laissez personne confisquer votre décision.

 

Confier un bébé à l'adoption ou accoucher sous x ne sont pas des démarches courantes en France. Il est donc possible que quelques soignants soient un peu perdus face à votre demande et que des conflits naissent. N'hésitez pas à leur fournir si besoin des textes légaux pour défendre vos droits et votre projet, notamment :

- sur votre droit au secret de votre identité (source ICI)

- sur le délai de renoncement au consentement à l'adoption (source ICI)

- sur la prise en charge financière de votre accouchement (source ICI)

Vous pouvez également communiquer ce document de l'APHP reprenant les bases de la prise en charge hospitalière d'une personne désirant accoucher sous x.

 

Les professionnels que vous croiserez dans votre parcours vous demanderont possiblement tout et son contraire selon l'interlocuteur que vous aurez. Par exemple l'un vous dira de vous investir dans votre grossesse, l'autre de vous en détacher. L'un vous demandera de projeter le bébé à naître, l'autre vous demandera de ne pas vous en préoccuper. Etc...

La meilleure réaction que vous pourrez opposer à ça, c’est comme bien souvent de suivre votre instinct : vivez votre grossesse comme vous le voulez, ou comme vous le pouvez. Projetez le bébé ou non. Aimez-le, détestez-le.

 

La seule chose qu'on peut légitimement vous demander est de ne pas nuire au foetus, puis au bébé. Vous serez probablement plus étroitement surveillée à ce niveau que les autres personnes enceintes. si cela devient oppressant, n'hésitez pas à le signaler. Vous avez le droit d'être respectée et soutenue.

Mini FAQ

Une silhouette S'appuie sur un point d'interrogation

Le second géniteur de l'enfant peut-il reconnaître l'enfant si j'accouche sous x ?

La personne avec qui vous avez conçu l'enfant peut théoriquement reconnaître l'enfant. Deux cas de figure peuvent se présenter :

- Si le second géniteur est au courant de votre grossesse, il peut faire une reconnaissance anticipée de paternité (source ICI). Il peut également, s'il est au courant de l'accouchement, reconnaître l'enfant jusqu'à l'extinction du délai de deux mois avant le placement à l'ASE (source ICI). 

- Si le second géniteur apprend  sa paternité biologique seulement quand l'enfant est né mais ne sait pas où le bébé est pris en charge, il peut demander au procureur de la république d'effectuer des recherches, en espérant avoir les informations nécessaires pour établir sa paternité avant le placement définitif à l'ASE.

Une fois passée cette date butoir, il sera très difficile au second géniteur de revendiquer sa parentalité.

Le secret de mon identité peut-il être levé sans mon accord ?

Non. Il est possible qu'on vous contacte si l'enfant devenu grand recherche ses origines, mais le seul cas où votre identité peut être dévoilée sans votre accord, c'est après votre décès (source ICI).

En revanche, vous pouvez vous-même décider de lever le secret auprès du CNAOP, le conseil national d'accès aux origines personnelles. Cela ne crée pas de lien de filiation juridique.